Ankèt

Assassinat de Jovenel Moïse : Dimitry Herard brise enfin le silence

L’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, survenu le 7 juillet 2021, a plongé Haïti dans une crise politique et sécuritaire sans précédent. Plus de trois ans après ce crime qui a choqué le pays et la communauté internationale, Dimitry Herard, ancien commandant de l’unité spéciale de la garde présidentielle, rompt finalement le silence.

Dans une série de révélations explosives publiées sur les réseaux sociaux ce mardi 4 mars 2025, Herard accuse plusieurs acteurs nationaux et internationaux d’avoir orchestré un complot savamment élaboré pour éliminer le chef de l’État. Ses déclarations mettent en cause les États-Unis, une partie de la classe politique haïtienne et certains oligarques corrompus.
L
Un complot international dévoilé

Figure clé de l’appareil sécuritaire présidentiel au moment des faits, Dimitry Herard livre des détails troublants sur les coulisses de l’assassinat. Selon lui, ce crime ne résulte pas d’une simple opération menée par des mercenaires isolés, mais bien d’un plan concerté impliquant des acteurs puissants, à la fois locaux et étrangers.

Dans sa déclaration, Herard pointe du doigt plusieurs institutions américaines, dont le département d’État, la CIA, le FBI et l’ambassade des États-Unis en Haïti. Il accuse également des figures influentes de la politique et de l’économie haïtiennes d’avoir activement participé à ce complot.

Un assassinat lié à la Russie ?

Selon Herard, l’un des principaux motifs derrière l’assassinat serait la décision de Jovenel Moïse d’accepter les lettres de créance d’un ambassadeur russe en Haïti. Ce geste, perçu comme un affront par les autorités américaines, aurait déclenché une série de manœuvres visant à éliminer le président, jugé trop indépendant et incontrôlable.

Accusations graves contre les États-Unis

L’une des révélations les plus accablantes concerne directement le rôle des États-Unis. Dimitry Herard affirme qu’en février 2021, un haut fonctionnaire américain l’aurait approché pour organiser un coup d’État visant à renverser Jovenel Moïse. Ce plan ayant échoué, les États-Unis auraient ensuite envoyé une société de sécurité pour évaluer les dispositifs de protection du président, facilitant ainsi l’exécution de l’assassinat quelques mois plus tard.

Herard dénonce également l’ingérence américaine dans l’enquête post-assassinat. Il affirme que le FBI, dès le lendemain du crime, a saisi des éléments cruciaux : caméras de surveillance, serveurs, documents sensibles et même le téléphone personnel de Jovenel Moïse. À ce jour, ces éléments n’ont jamais été rendus publics, alimentant les soupçons de dissimulation.

Une enquête sabotée

L’ancien commandant critique la manière dont l’enquête a été menée. Selon lui, les autorités haïtiennes ont été délibérément tenues à l’écart, tandis que plusieurs suspects-clés ont été extradés vers les États-Unis, empêchant ainsi une investigation indépendante sur le sol haïtien.

Parmi les figures haïtiennes pointées du doigt par Herard figurent Léon Charles, ex-directeur général de la Police Nationale, et Rock Feller Vincent, ancien ministre de la Justice. Il les accuse de complicité active dans l’assassinat. Il cite également Joseph Félix Badio, présenté comme l’un des cerveaux de l’opération.

Violations du droit haïtien

Dimitry Herard dénonce fermement l’extradition vers les États-Unis de plusieurs suspects-clés, dont Rodolphe Jaar, John Joël Joseph, et Palacios Palacios. Il considère ces extraditions comme une violation flagrante du principe de territorialité du droit pénal haïtien. Il s’insurge également contre le transfert de deux Haïtiano-Américains, James Solages et Joseph Vincent, ainsi que du pasteur Christian Emmanuel Sanon, vers les États-Unis.

À qui profite le crime ?

Pour Herard, la responsabilité de l’assassinat incombe à une alliance opportuniste entre certains segments de l’establishment américain, l’élite économique haïtienne — dont la famille Vorbes — et des politiciens locaux corrompus. Cette coalition aurait vu en Jovenel Moïse une menace directe à ses intérêts économiques et géopolitiques, notamment en raison de ses réformes et de son rapprochement stratégique avec la Russie.

Un appel à la vérité et à la justice

Face à la gravité de ses accusations, Dimitry Herard réclame la déclassification des documents américains relatifs à l’assassinat de Jovenel Moïse. Il a officiellement adressé une lettre au président américain Donald Trump et au secrétaire d’État Marco Rubio, exhortant les autorités américaines à faire toute la lumière sur cette affaire.

Au-delà de ses révélations, Herard lance un appel pour la mise en place d’une enquête internationale indépendante. Il espère que cette mobilisation permettra d’identifier tous les commanditaires et complices du crime, afin de briser le cycle d’impunité qui gangrène Haïti.

Les déclarations de Dimitry Herard jettent une lumière crue sur les enjeux géopolitiques, économiques et politiques qui ont conduit à l’assassinat de Jovenel Moïse. Si elles suscitent déjà de vives réactions, elles rappellent aussi l’urgence d’une quête de vérité, essentielle pour restaurer la souveraineté et la dignité d’Haïti.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *