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Dans un contexte de violence persistante et de profond désarroi social, l’installation du nouveau directeur général de la Police nationale d’Haïti (PNH), Vladimir Paraison, suscite autant d’espoir que de scepticisme. La population attend une inflexion claire de la stratégie sécuritaire, mais les premiers signaux de cette nouvelle direction semblent, pour beaucoup, peu convaincants.

Le vendredi 8 août 2025, Vladimir Paraison a officiellement pris les rênes de la PNH en remplaçant Normil Rameau, dans un climat alourdi par l’insécurité et la défiance populaire. Lors de son discours inaugural, il s’est engagé à renforcer les opérations de terrain, rétablir la confiance avec les citoyens et lutter contre la criminalité organisée. Des paroles fortes, mais qui n’ont pas encore été suivies d’annonces concrètes sur la redéfinition de la stratégie sécuritaire.
À Kenscoff, dans la région de l’Artibonite, les gangs armés poursuivent leurs exactions : pillages, enlèvements, assassinats de policiers. Au moins cinq agents de la PNH ont été tués au cours des deux dernières semaines, selon des sources des droits humains.
Dans les rues de Delmas, l’arrivée du nouveau directeur ne suscite guère d’enthousiasme. Marie-France, commerçante de 42 ans, dont le magasin a été vandalisé à deux reprises, confie : « Changer de directeur, ce n’est pas changer la réalité. On a déjà vu plusieurs visages passer à ce poste, et pourtant, rien ne change. La peur, elle, est toujours là. »
Même sentiment pour Wilson, chauffeur de taxi à Clercine : « Ils parlent toujours de renforcer la sécurité. Mais où sont les policiers quand on se fait kidnapper à Delmas, en plein centre-ville ? Tant qu’il n’y aura pas une vraie stratégie, avec des résultats visibles, ça ne sert à rien de changer de tête. »
Un changement de visage, mais pas encore de cap
Pour le spécialiste en sécurité Jean-René Alexis, ce scepticisme est compréhensible. Depuis 2018, les changements à la tête de la PNH se succèdent sans rupture réelle dans les méthodes. Selon lui, les Haïtiens attendent un plan d’action clair, chiffré et coordonné avec les forces internationales et les acteurs locaux.
Interrogé sur l’absence de mesures concrètes à court terme, M. Alexis souligne un manque de transparence stratégique. « Si le nouveau DG veut rétablir la confiance, il doit dire ce qu’il va faire, quand et comment. Combien d’unités seront déployées dans les zones sensibles ? Quelles technologies seront utilisées pour le renseignement ? Quels moyens pour protéger les policiers eux-mêmes, qui sont devenus des cibles ? »
Il insiste aussi sur la nécessité de réformer la structure même de la PNH, trop centralisée et souvent mal équipée. « On ne peut pas affronter des groupes lourdement armés avec des moyens obsolètes, une logistique défaillante et un moral au plus bas. La réforme de la chaîne de commandement, la dotation en matériel moderne et la formation continue doivent faire partie du socle de toute nouvelle stratégie. »
L’urgence de résultats tangibles
Au-delà des discours et des nominations, les citoyens réclament une amélioration concrète de leur quotidien. Le mandat de la force multinationale d’appui à la sécurité reste partiel et lent à se déployer.
En attendant, les Haïtiens vivent dans un entre-deux oppressant, où chaque jour peut basculer dans la violence. Sans signaux forts et rapidement visibles, le passage de témoin à la tête de la PNH pourrait n’être qu’un énième chapitre d’annonces sans lendemain. « Ce n’est pas de nouveaux uniformes qu’on veut voir, c’est des résultats », conclut Marie-France.
Le changement à la PNH offre une opportunité, mais à condition qu’il soit accompagné d’un véritable changement de méthodes, de priorités et de communication. Sans cela, l’espoir des citoyens risque de se transformer, une fois de plus, en désillusion.
Judelor Louis Charles
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