Entre le 27 janvier et le 27 mars 2025, la commune de Kenscoff, au sud de Port-au-Prince, a été le théâtre d’attaques d’une brutalité inédite. Dans un rapport alarmant publié ce lundi 7 avril, le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) révèle un bilan sanglant : 262 morts, 66 blessés, près de 200 maisons incendiées et plus de 3.000 déplacés internes.
Ces violences ont été menées par des gangs armés, dont ceux de Gran Ravine, Ti Bois et Village de Dieu, aujourd’hui réunis au sein de la coalition Viv Ansanm. Leur objectif : contrôler les zones stratégiques de Kenscoff, notamment la route récemment réhabilitée menant à Jacmel, considérée comme l’un des rares axes sûrs vers le Sud du pays.
Un bilan humain déchirant
Parmi les victimes, on compte 115 civils et 147 membres de gangs, dont 203 hommes, 50 femmes, 6 garçons et 3 filles. Les autorités déplorent également la mort de 8 policiers. Le rapport fait état d’exécutions sommaires, de corps calcinés, et de violences sexuelles systématiques : au moins 14 victimes, dont 7 femmes et 7 filles, auraient été violées durant la préparation des attaques.
Des localités telles que Bélot, Berthé, Bois Major et Bongard ont été partiellement vidées de leurs habitants, désormais réfugiés sans assistance dans les zones environnantes.
Lenteur de l’État, silence coupable
Le BINUH pointe la lenteur de la réponse des autorités haïtiennes, alors que des informations préalables sur les intentions des gangs avaient été transmises au Conseil supérieur de la police nationale (CSPN). Le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé l’a reconnu publiquement, sans que des mesures concrètes aient été prises. Cette déclaration intervient dans un contexte tendu, où le chef du gouvernement envisage de remplacer le directeur général de la PNH, Rameau Normil.
Un pays en chute libre
Selon l’ONU, entre le 1er janvier et le 27 mars 2025, 1.518 personnes ont été tuées et 573 blessées à travers le pays. Ce chiffre s’ajoute aux 5.601 morts et 2.212 blessés enregistrés en 2024, dressant un tableau de plus en plus sombre de la situation sécuritaire.
Le BINUH appelle à l’action
L’organisme onusien recommande de toute urgence :
• La mise en place d’un plan national de reconquête territoriale.
• Le renforcement des capacités de renseignement de la PNH.
• Un soutien accru à la Mission multinationale d’appui à la sécurité.
Alors que les gangs poursuivent leur avancée, notamment vers Mirebalais et Saut-d’Eau, Kenscoff devient un symbole de l’échec de l’État à protéger ses citoyens, et de la nécessité d’un sursaut national et international.