Nouvèl ak Analiz

Haïti, ce pays où l’on ne vit plus, on survit

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Par Wandy CHARLES

En Haïti, on ne vit pas, on résiste. La notion même de loisir, dans son sens plein, semble étrangère à notre quotidien. Le plaisir n’est plus qu’un mirage. Le stress, la peur et la frustration ont progressivement grignoté l’espace du bonheur simple et des joies ordinaires. Dans les villes comme dans les provinces, le droit au divertissement, à la détente et à l’épanouissement semble avoir été confisqué.

Depuis quand n’avez-vous pas mis les pieds dans une salle de cinéma fonctionnelle, à l’abri des coupures de courant ou du vacarme extérieur ? Depuis quand n’avez-vous pas vibré au rythme d’un spectacle digne de ce nom avec ses jeux de lumière, ses chorégraphies millimétrées, ses sketches hilarants, ses prestations vocales maîtrisées, comme on en voit ailleurs, dans ces pays où l’on prend encore le temps de vivre ? Où sont ces concerts soigneusement produits, pensés pour durer des heures, portés par des artistes présents, accessibles, dévoués à leur public ? Où sont les étoiles de la scène haïtienne ? La plupart ont fui, comme tant d’autres, pour échapper au vide.

Le vide. Voilà le mot. Il n’existe presque aucun espace conçu pour accueillir les familles, les enfants, les amoureux, les promeneurs. Les parcs de jeux sont rarissimes. Bo Jeux, pour ceux qui s’en souviennent, n’est plus qu’un souvenir nostalgique : la zone où il se trouvait est désormais aux mains de groupes armés. Quant aux rares projets de loisirs pour enfants, ils étouffent sous le poids de l’insécurité ou tombent dans l’oubli, faute de moyens et de sérénité.

En Haïti, les citoyens ne vivent plus vraiment. Ils n’ont plus accès aux loisirs, aux randonnées familiales, aux sorties amoureuses, aux vacances improvisées. Ils avancent, tête baissée, dans une société qui ne leur laisse que peu d’espaces pour rêver, encore moins pour souffler.

À défaut de mieux, on se rabat sur les fameuses « BRH), ces Bars, Restaurants et Hôtels transformés en uniques zones de « respiration » sociale. Mais ces lieux ne remplacent pas l’expérience d’un loisir sain, collectif, accessible, structuré. Même les fameuses “Car Wash Party” et autres “Ti Sourit”, longtemps considérés comme sulfureux ou moralement discutables, ont disparu et balayés par la peur.

Et avec cette disparition vient un mal bien plus insidieux : l’impossibilité d’évacuer les tensions, les frustrations, les angoisses que la vie quotidienne ne cesse d’accumuler. Comment garder son équilibre mental quand tout vous exhorte à la méfiance, à l’isolement, à la résignation ? Comment aspirer à la beauté quand la ville vous vomit ses klaxons, ses rafales de balles, ses décharges à ciel ouvert et ses murs éventrés ? Comment rester humain sans rire, sans jeu, sans mouvement ?

Et pourtant, le loisir n’est pas un luxe. Il est une nécessité. Un besoin fondamental. Une soupape. Un rempart contre la violence, le désespoir, le déracinement. Le nier, c’est condamner une nation à la suffocation lente. Le restaurer, c’est redonner à un peuple le droit d’être heureux, tout simplement.

Vant Bef Info (VBI)

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