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Haïti : l’ONU recense plus de 1.500 morts en trois mois, la violence s’étend hors de la capitale

Au moins 1.520 personnes ont été tuées en Haïti entre avril et juin 2025 dans un contexte de violences armées toujours plus graves, selon un communiqué dont TripFoumi Enfo a pris connaissance. Le document, publié ce vendredi 1er août par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), révèle une situation des droits humains en pleine détérioration.

Si l’avancée des gangs dans certains quartiers de Port-au-Prince semble avoir ralenti, leur emprise s’est nettement renforcée en province, notamment dans le Bas Artibonite et le département du Centre. Kenscoff reste l’un des points chauds de la capitale.
« Les attaques continuent de provoquer des déplacements massifs et des violations graves des droits humains, avec des conséquences dramatiques sur les femmes et les enfants », a déclaré Ulrika Richardson, cheffe par intérim du BINUH.

Les chiffres d’un pays en détresse

Entre le 1er avril et le 30 juin 2025, les violences ont causé au moins 1.520 morts, 609 blessés, 185 enlèvements et 628 cas de violences sexuelles. La majorité des victimes se trouve dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, suivie par l’Artibonite et le Centre. Selon le communiqué, 24 % des victimes ont été tuées ou blessées directement par les groupes criminels. Meurtres, viols collectifs, enlèvements, traite et exploitation d’enfants… Les gangs utilisent la terreur pour maintenir leur domination. Des cas d’esclavage sexuel ont aussi été rapportés.

Des opérations de police meurtrières

Près des deux tiers des victimes sont tombées lors d’opérations des forces de sécurité contre les gangs. Plus d’un tiers d’entre elles ont été tuées dans des frappes par drones explosifs. Mais les civils paient un lourd tribut : au moins 15 % des personnes tuées ou blessées ne faisaient partie d’aucun groupe armé. Quatre membres des forces de l’ordre ont également péri durant ces opérations. Plus troublant encore, des policiers et le commissaire du gouvernement de Miragoâne seraient impliqués dans 73 exécutions sommaires.

Le mouvement « Bwa kale » aussi pointé du doigt

Au moins 12 % des personnes tuées ou blessées durant ce trimestre l’ont été par des groupes d’autodéfense ou des citoyens liés au mouvement « Bwa kalé », visant des présumés membres de gangs ou leurs complices.

Une crise humanitaire aggravée

La violence a encore poussé des centaines de milliers de personnes à fuir leur foyer. Au 30 juin 2025, Haïti comptait plus de 1,3 million de déplacés internes. Face à cette urgence, les Nations Unies disent continuer d’appuyer les autorités haïtiennes malgré les dysfonctionnements persistants de la justice. En avril, le gouvernement a adopté un décret créant deux pôles judiciaires spécialisés dans les crimes de masse et les crimes financiers. Plusieurs sessions d’assises ont été organisées, et la police a renforcé ses unités de lutte contre les violences sexuelles.

Un appel à l’action nationale et internationale

Le BINUH presse l’État haïtien de renforcer la lutte contre les gangs, dans le respect des droits humains. Le rapport recommande également d’accélérer le filtrage (vetting) au sein de la police, de finaliser la mise en place des pôles judiciaires spécialisés et de protéger les civils.

La communauté internationale, elle, est invitée à appuyer pleinement le déploiement de la Mission multinationale de soutien à la sécurité et à redoubler d’efforts contre le trafic d’armes qui alimente la violence.

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