À l’exception du haut Delmas, de quelques parcelles de la commune de Tabarre et d’une partie de Pétion-Ville, la zone métropolitaine de Port-au-Prince est aujourd’hui contrôlée presqu’entièrement par des groupes criminels armés. Selon les Nations unies, ces gangs dominent plus de 85 % du territoire. Depuis le lundi 27 janvier, la commune de Kenscoff, située aux abords de Pétion-Ville, est la cible d’une offensive lancée par la coalition terroriste « Viv ansanm ». Désormais, elle semble sur le point de rejoindre la liste des territoires perdus.
Un encerclement stratégique des gangs
Les malfrats occupent déjà des zones stratégiques de Kenscoff, selon le maire Jean Massillon, qui a tiré la sonnette d’alarme lors de son intervention à la matinale de Caraïbes FM ce lundi 3 février. Il a alerté que les criminels révisent leurs stratégies pour prendre le contrôle du centre-ville de la municipalité.
Selon lui, tôt ce matin, la localité de Bois d’Avril, située dans les hauteurs de la commune, a été encerclée par des hommes armés. Sans intervention rapide des forces de l’ordre, cette position leur offrirait un accès direct à Gaudé, ouvrant ainsi la voie à une invasion du centre de Kenscoff.
Face à cette situation critique, le maire Massillon appelle à une intervention immédiate des forces de l’ordre pour éviter que la municipalité ne tombe sous contrôle criminel. Il enjoint les autorités policières et militaires à ne pas se désengager du terrain et à prendre des mesures urgentes pour protéger la population.
Des mesures d’urgence adoptées
L’administration communale de Kenscoff a mis en place plusieurs mesures d’urgence afin de contrer l’assaut des gangs. Parmi celles-ci :
• Suspension des stations de motocyclettes jusqu’à nouvel ordre.
• Interdiction formelle du transport de carburant dans des gallons jaunes par les chauffeurs de motos, afin d’empêcher l’approvisionnement des criminels en combustible pour leurs armes et engins incendiaires.
• Mise en garde aux stations-service pour qu’elles ne vendent plus de carburant dans ces récipients.
Par ailleurs, le maire Massillon appelle à la collaboration totale de la population pour soutenir les efforts visant à contrer cette attaque criminelle.
Une vague de déplacés et des dizaines de morts
L’attaque de la coalition terroriste « Viv ansanm » a déjà provoqué une nouvelle vague de déplacés, venant s’ajouter aux plus d’un million de personnes déjà enregistrées par l’ONU.
À ce jour, plus de 300 familles sont réfugiées dans les locaux de l’hôtel de ville et de l’église catholique de Kenscoff.
Aucun bilan officiel n’a encore été établi concernant le nombre de victimes civiles. Toutefois, des témoignages de survivants font état de plusieurs dizaines de morts.
Actuellement, plusieurs localités de Kenscoff sont sous contrôle criminel. Selon la Casec Lisius Caroline Jules, les gangs ont déjà pris le contrôle de Bongads, Bellot, Le Montcel, Cajacques, et d’autres zones.
Ce lundi matin, de violents affrontements ont éclaté entre les forces de l’ordre et les assaillants à Gaudé. À Carrefour Bette, les criminels ont incendié plusieurs propriétés, dont certaines situées près du presbytère, à proximité de Bongads.
Une attaque prévue, mais aucune réponse des autorités
Fait troublant : le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, également chef du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN), avait déclaré jeudi dernier être au courant de cette attaque imminente. Pourtant, aucune mesure préventive n’a été prise pour mobiliser les forces de sécurité en amont.
L’inaction du gouvernement suscite des critiques sévères. L’ancien Premier ministre Jean-Michel Lapin qualifie même Fils-Aimé d’incompétent, estimant qu’il n’est pas à la hauteur du poste.
Kenscoff va-t-elle tomber ?
La commune de Kenscoff va-t-elle résister ou céder sous la pression des gangs ?
Pour l’instant, l’issue demeure incertaine. Seuls les prochains jours et semaines détermineront si Kenscoff rejoindra la liste des zones sous contrôle criminel ou si, cette fois, la Police nationale d’Haïti réussira enfin à renverser la tendance.