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En Haïti, où une grande partie de la population vit dans des conditions précaires, la question de l’éducation numérique semble davantage une illusion qu’une réalité accessible. Bien que l’idée de mettre en place des classes à distance en réponse aux crises sociales et sécuritaires soit saluée, la réalité sur le terrain montre que ces initiatives sont loin d’être viables, surtout dans les zones à risque.
Port-au-Prince, le 27 mars 2025._
Dans de nombreuses régions du pays, l’absence d’électricité régulière représente déjà un obstacle majeur à l’accès à l’enseignement numérique. Une grande proportion de la population haïtienne ne dispose pas d’une source d’énergie stable, ce qui rend l’utilisation des outils numériques quasi impossible. Par ailleurs, les familles qui parviennent à avoir de l’électricité se retrouvent souvent confrontées à des factures exorbitantes, rendant l’accès à Internet inaccessible pour une large part de la population.
Les entreprises de télécommunications, bien qu’elles soient présentes, offrent des services souvent irréguliers et coûteux, avec des connexions lentes et instables, particulièrement dans les zones rurales et périurbaines. Dans ces conditions, la solution des classes à distance devient une fausse promesse. Les élèves, qu’ils se trouvent dans des zones urbaines ou rurales, peinent à se connecter, et ceux qui réussissent à se connecter bénéficient d’une qualité d’enseignement limitée.
Au-delà des infrastructures défaillantes, un autre frein majeur à l’implémentation des classes à distance réside dans le manque de maîtrise de la technologie par la majorité des parents et des élèves. Le fossé numérique en Haïti est exacerbé par l’absence de formations adéquates en technologies de l’information et de la communication (TIC). La population n’est pas suffisamment formée à l’utilisation des outils numériques, et bien que certaines initiatives aient été mises en place pour former les enseignants, ces efforts demeurent insuffisants.
De nombreux parents, déjà confrontés à des difficultés économiques, sociales et sécuritaires, ne maîtrisent pas les outils nécessaires pour accompagner leurs enfants dans l’apprentissage à distance. Ces lacunes technologiques rendent l’enseignement à distance non seulement inefficace, mais également injuste, car elles creusent davantage la disparité entre ceux qui ont accès à la technologie et ceux qui en sont privés.
L’État semble se concentrer sur des solutions temporaires, telles que la diffusion de cours via des médias de masse (télévision et radio), qui, bien qu’utiles, ne répondent pas aux besoins d’un apprentissage interactif et individualisé. Le manque de suivi pédagogique et de supports adaptés à la réalité locale rend cette approche encore moins efficace. De plus, l’infrastructure nécessaire pour diffuser ces cours à une large échelle reste insuffisante.
En fin de compte, l’option des classes à distance, sans réseau solide ni infrastructure adéquate, demeure une illusion. Il est impératif que l’État haïtien, en collaboration avec les acteurs privés et internationaux, mette en place une stratégie d’éducation numérique qui tienne compte des réalités locales : l’accès à l’électricité, l’amélioration des réseaux de télécommunication et la formation des citoyens à l’utilisation des TIC. Tant que ces conditions ne seront pas réunies, la promesse d’une éducation numérique pour tous restera une utopie.
Yves Manuel
Vant Bèf Info (VBI)
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