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Près de 100 000 enfants haïtiens risquent de ne plus recevoir de repas scolaires dans les prochaines semaines, alerte le Programme Alimentaire Mondial (PAM). En cause : un manque critique de financements au moment même où le pays entre dans la saison cyclonique, avec des entrepôts vides et très peu de ressources, même pour acheter des produits locaux.
Port-au-Prince, 12 juin 2025 —Selon la journaliste Jacqueline Charles du Miami Herald, ce recul budgétaire pourrait anéantir dix ans de progrès dans la mise en place d’un programme de cantines scolaires initié, entre autres, par l’ancien ministre de l’Éducation, Nesmy Manigat. « Le programme pourrait perdre jusqu’à 100 000 bénéficiaires », a-t-elle écrit sur X (anciennement Twitter).
Des coupes américaines qui fragilisent l’aide alimentaire
La situation est d’autant plus préoccupante qu’elle survient dans un contexte de réduction possible de l’aide humanitaire américaine. L’administration Biden a soumis au Congrès une proposition de réallocation de plusieurs dizaines de millions de dollars, ce qui impacterait directement les opérations du PAM en Haïti. Si elle est validée, cette décision entrerait en vigueur dans un délai de 45 jours.
« En temps normal, nous nourrissons environ 500 000 enfants chaque jour. Sans un appui immédiat, ce chiffre pourrait être réduit de moitié », a déclaré Lola Castro, directrice régionale du PAM pour l’Amérique latine et les Caraïbes, lors d’un point de presse à New York.
Une insécurité alimentaire aiguë dans tout le pays
Haïti s’enfonce dans une crise alimentaire sans précédent. Selon les dernières données des Nations Unies, 5,7 millions de personnes vivent actuellement en situation d’insécurité alimentaire aiguë — soit 300 000 de plus qu’en 2024. Le pays rejoint ainsi les zones d’urgence mondiale comme le Soudan, le Mali, le Soudan du Sud et la bande de Gaza.
Cantines scolaires : un levier de développement local
Pour Nesmy Manigat, aujourd’hui président du comité des finances du Partenariat Mondial pour l’Éducation, la menace actuelle risque de faire reculer une décennie d’efforts pour bâtir une stratégie de souveraineté alimentaire.
« Grâce à la Stratégie nationale d’alimentation scolaire lancée en 2015, nous sommes passés de 1 % à 70 % de produits locaux dans les repas distribués dans les cantines », a-t-il souligné. Il appelle à un engagement budgétaire accru de l’État haïtien, avec pour objectif d’atteindre 8 % du PIB consacré à l’éducation, contre moins de 2 % actuellement.
Manigat propose également d’intégrer les cantines scolaires dans une approche multisectorielle, liant éducation, agriculture et santé publique. Il prône le développement de lycées techniques, la création de partenariats nationaux et la mise en place de programmes de formation dans les domaines logistiques et agricoles.
« L’alimentation scolaire peut devenir une locomotive du développement rural et national », conclut-il.
Mederson Alcindor
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