Lourdia Jean Pierre, 32 ans, a rendu son dernier souffle seule, après avoir mis au monde son enfant sans assistance médicale chez elle à El Seibo, en République dominicaine. Par peur d’être arrêtée et expulsée, cette mère haïtienne en situation irrégulière avait refusé de se rendre à l’hôpital lorsque les contractions ont commencé à l’aube du vendredi 9 mai 2025.
« Elle a commencé à avoir mal vers cinq heures du matin. Elle a dit qu’elle n’irait nulle part », raconte Ronald Jean, son compagnon, encore sous le choc. « Elle a accouché, et puis… elle ne s’est plus relevée. », a-t-il ajouté. Désemparé, c’est lui qui a alerté les secours. Lorsque les agents du 9-1-1 sont arrivés, il était déjà trop tard : Lourdia ne présentait plus de signes vitaux. Son décès a été constaté sur place, dans la pièce principale de leur modeste demeure.
Lourdia laisse derrière elle quatre enfants, dont deux vivent en Haïti. Le nouveau-né, sain et sauf, a été confié temporairement à une parente dans la commune voisine de Miches. « Elle le garde jusqu’à ce que je reprenne des forces et que je trouve du travail », confie Ronald, les yeux creusés par la douleur et l’incertitude.
Dans ce coin reculé de la République dominicaine, la tragédie de Lourdia résonne comme un cri étouffé. La politique migratoire actuelle, qui conditionne l’accès aux soins à la présentation de documents officiels, plonge de nombreux migrants dans la peur. Les autorités affirment que les urgences sont garanties pour tous, mais dans les faits, la crainte d’être dénoncé suffit souvent à éloigner les plus vulnérables des centres de santé. Lourdia, elle, a préféré rester chez elle. Elle n’a jamais franchi la porte de l’hôpital.