Quatre ans. Cela fait quatre ans que cinq policiers ont été massacrés dans une embuscade au village de Dieu, leurs corps traînés, humiliés, exhibé comme un trophée par les assassins. Quatre ans que les autorités haïtiennes, promises à une riposte, n’ont rien fait. Aujourd’hui, non seulement les coupables de ce carnage n’ont jamais été inquiétés, mais ils règnent en maîtres sur Port-au-Prince, imposant leur loi là où l’État a disparu.
12 mars 2021 : une humiliation nationale
Ce jour-là, la Brigade de lutte contre le trafic de stupéfiants (BLTS) et le SWAT ont été envoyés en mission dans le quartier du village de Dieu, un bastion du gang « 5 Segond » dirigé par Izo. La mission ? Tenter de déloger ces criminels qui terrorisaient déjà la population.
Mais ce qui devait être une opération policière s’est transformé en un véritable piège mortel. Mal renseignés, mal équipés, sans soutien aérien ni renforts, les policiers ont été pris sous un déluge de balles. Cinq d’entre eux ont été abattus sur place. Les survivants, en sous-nombre, ont dû fuir, laissant derrière eux les cadavres de leurs camarades, livrés aux mains des bourreaux.
Les images de ce carnage ont circulé sur les réseaux sociaux : des policiers exécutés, dépouillés, traînés à même le sol sous les rires des assassins. Un affront sans précédent.
Une promesse de vengeance jamais tenue
Face à l’indignation nationale, le gouvernement d’alors avait promis une riposte. « Nous allons frapper fort », avaient clamé les autorités d’alors. « Nous allons récupérer les corps, traquer les coupables. »
Mais cette promesse, comme tant d’autres, n’a jamais été tenue.
Les jours ont passé, puis les semaines, puis les mois. Aucune opération militaire n’a été lancée. Aucun responsable n’a été arrêté. Le village de Dieu, loin d’être nettoyé, s’est transformé en un bunker impénétrable, d’où les gangs ont continué à se structurer et à étendre leur emprise sur la capitale.
Quatre ans plus tard : un pays sous occupation criminelle
Aujourd’hui, Haïti ne contrôle plus sa propre capitale. Plus de 80 % de Port-au-Prince sont aux mains de gangs armés, plus puissants que jamais.
• Martissant, autrefois un simple point chaud, est devenu un « no man’s land » où les bandits attaquent qui ils veulent, quand ils veulent.
• Carrefour-Feuilles, Delmas, Croix-des-Bouquets : autant de zones qui, chaque jour, passent sous le contrôle des gangs.
Les criminels dictent leurs lois. Ils kidnappent en plein jour, attaquent les commissariats, exécutent des citoyens sans conséquence. Et l’État regarde, impuissant.
Haïti : un territoire sans loi
Le village de Dieu n’a pas seulement été le théâtre d’un carnage policier. Il a été le tournant d’une prise de pouvoir criminelle, un point de bascule après lequel l’État a tout simplement abandonné la lutte.
Aujourd’hui, Haïti n’est plus une nation gouvernée. C’est un territoire sous occupation criminelle.
• Ce ne sont plus les élus qui font la loi, mais les caïds des gangs.
• Ce ne sont plus les juges qui rendent la justice, mais les kalachnikovs et les machettes.
• Ce ne sont plus les forces de l’ordre qui assurent la sécurité, mais les kidnappeurs et les assassins qui la contrôlent.
Et face à cela, les dirigeants haïtiens n’ont que leur silence à offrir.
Jusqu’à quand ?
Jusqu’à quand ce peuple, martyrisé, devra-t-il subir l’incompétence, la lâcheté et la corruption de ses propres dirigeants ?
Jusqu’à quand Haïti restera-t-elle un pays où les criminels sont plus protégés que les citoyens honnêtes ?
Jusqu’à quand allons-nous tolérer qu’un État fantôme se fasse humilier par des gangs qui n’auraient jamais dû exister ?
Quatre ans après le massacre du Village de Dieu, Haïti continue de sombrer.
Et l’État, lui, continue de courber l’échine.