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Le président colombien Gustavo Petro est arrivé en Haïti ce vendredi pour une visite officielle de deux jours. Reçu à l’aéroport Toussaint Louverture par Fritz Alphonse Jean, coordonnateur du Conseil présidentiel de transition, le chef d’État sud-américain entend exprimer son soutien à un pays en proie à une crise multiforme. Mais au-delà de l’affichage de solidarité, cette visite soulève des questions sur les motivations réelles de la Colombie dans la région.
Port_au- Prince, le 18 juillet 2025.-C’est la deuxième fois cette année que Gustavo Petro foule le sol haïtien. Après une première visite discrète en janvier à Jacmel, le président colombien réitère son appui aux autorités de transition, dans un contexte où Haïti vit l’une des périodes les plus sombres de son histoire récente : insécurité endémique, effondrement des institutions, instabilité politique chronique.
Officiellement, Petro affirme vouloir honorer une dette morale : « Haïti a aidé la Colombie à conquérir son indépendance, il est de notre devoir historique de l’accompagner aujourd’hui dans son processus de pacification », a-t-il déclaré. Ce rappel historique flatte l’ego haïtien et ancre sa démarche dans une trame narrative de solidarité post-coloniale.
Lors de la première rencontre en janvier avec Leslie Voltaire, alors président du Conseil présidentiel de transition, un agenda bilatéral avait été esquissé. Il couvrait des domaines aussi divers que l’économie, la culture, la technologie ou encore la sécurité. Aujourd’hui, le président colombien revient pour, selon ses mots, « consolider un cadre de coopération stratégique ».
Une présence diplomatique lourde de sens
Mais ce geste, aussi noble soit-il, ne peut être dissocié du contexte géopolitique actuel. Haïti est devenu un point névralgique de tensions régionales. Les États-Unis, le Canada, le Kenya et d’autres pays mobilisent des moyens pour une mission multinationale de soutien à la sécurité. Dans ce concert d’acteurs, la Colombie entend peut-être jouer sa propre carte.
En proposant le 9 juillet aux États-Unis de « travailler ensemble sur un plan de paix pour Haïti », Petro a clairement exprimé son ambition de se positionner comme un acteur incontournable dans les affaires caribéennes. Une manière pour la Colombie de sortir de son rôle périphérique au sein de la région, et d’affirmer son leadership politique et diplomatique dans les Caraïbes.
Un intérêt bien calculé ?
Si la solidarité affichée avec Haïti est sincère, elle n’est pas dénuée d’intérêts stratégiques. D’abord, Petro soigne son image internationale. Être vu comme un artisan de paix dans une région en crise peut renforcer sa stature sur la scène mondiale, notamment auprès des pays du Sud global.
Ensuite, Haïti peut représenter un terrain de coopération économique ou logistique pour la Colombie, à moyen terme. Dans un monde multipolaire, tout engagement diplomatique est aussi un placement.
Enfin, Petro pourrait chercher à inscrire son pays comme un partenaire alternatif dans la résolution de la crise haïtienne, face à des puissances parfois perçues comme néocoloniales par une partie de la population haïtienne.
Durant son séjour, Petro rencontrera les membres du Conseil présidentiel de transition, désormais présidé par Fritz Alphonse Jean. Il s’agira de donner suite aux engagements pris en janvier, mais aussi de discuter de formes concrètes de soutien dans la reconstruction, la sécurité et la gouvernance.
Yves Manuel
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